Né en 1842, Stéphane Mallarmé, fils de Numa Florent Joseph Mallarmé et d’Elisabeth Félice Desmolins est élevé par ses grands-parents après le décès de sa mère en 1847. Son œuvre littéraire débute tôt, vers 1854 et est marquée par le décès de sa sœur Maria en 1857 ; ses écrits sont fortement influencés par Victor Hugo (1802-1885), Théodore de Banville (1823-1891), Théophile Gautier (1811-1872) puis les Fleurs de Mal de Charles Pierre Baudelaire (1821-1867). Conscient qu’il ne pouvait vivre de son art, Stéphane Mallarmé décide d’être professeur d’Anglais et part à 20 ans pour Londres avec celle qu’il épousera là-bas, Maria Gerhard. De retour en France, il obtient en 1863 son certificat d’aptitude à l’enseignement de l’anglais et sa première nomination, « à titre suppléant, du cours d’anglais au lycée impérial de Tournon pendant la durée du congé accordé à M. Wright. »

Les années tournonaises de Stéphane Mallarmé débutent mal, celui-ci ne se plaisant pas du tout dans la ville et y étant un professeur manquant d’intérêt… Il sera muté en 1868 à la demande du proviseur et partira enseigner à Besançon (25) puis en Avignon (84). En 1871, il regagne Paris (75) où il est nommé au lycée Condorcet et s’entoure petit à petit de l’élite culturelle. Jusqu’en 1880, il la reçoit tous les mardis dans son appartement rue de Rome. René Ghil (1862-1925), Gustave Kahn (1859-1936), Jules Laforgue (1860-1887), Françis Viele-Griffin (1864-1937), Henri de Regnier (1864-1936), Maurice Barrès (1862-1923), Paul Claudel (1868-1955), André Gide (1869-1951), Paul Valéry (1871-1945) font partie des habitués. Parmi ses amis, Stéphane Mallarmé compte également Arthur Rimbaud (1854-1891), Edouard Manet (1832-1883), il sera le tuteur légal de sa nièce Julie, Emile Zola (1840-1902) qu’il rejoindra à l’Aurore et aux côtés duquel il soutiendra Alfred Dreyfus (1859-1935), Victor Hugo, Paul Verlaine (1844-1896), Oscar Wilde (1854-1900).

La poésie mallarméenne est caractéristique et annonciatrice du courant symbolique. Enfant à l’« âme lamartinienne » comme il se désigne, Stéphane Mallarmé place très haut dans son estime la poésie, qui requiert le don de soi total pour atteindre l’Idéal. Il se sent incapable de traduire sa communication avec l’Etre et la Beauté. Entre 1866 et 1869, il tombe dans une période de doute absolu et connaît l’angoisse de la feuille blanche. Cette période s’achève avec l’écriture de Igitur, un conte poétique et philosophique destiné à liquider la crise de l’absolu.
Sa poésie est dite « de l’absence ». Il entend traduire ce qu’il ressent pour la vue et pour l’œil, tout en conservant le caractère sacré de l’écriture. Il cherche à donner l’impression de l’objet plutôt que de le décrire ; il le traduit en symbole. Son entreprise passe par trois phénomènes : la dislocation de la phrase, la re-création des mots et la mise en sonorité de la poésie pour contribuer à l’évocation des choses. Par ces procédés, sa poésie est considérée comme hermétique, réservée aux initiés. Elle donnera naissance au courant symboliste.

Stéphane Mallarmé et le Lycée impérial de Tournon

« Son illustre passé, ses œuvres d’art, sa magnifique situation au bord du Rhône, les allées de marronniers de son parc séculaire, tout était fait pour séduire Mallarmé, s’il n’y était venu au début de sa carrière, sans expérience pédagogique, sans autorité sur des élèves dont quelque-uns avaient presque sont âge. »

Gabriel Faure,
Mallarmé à Tournon

 

Arrivé à Tournon à une triste époque de l’année, nommé professeur remplaçant alors qu’il ne voyait en l’enseignement qu’un moyen de gagner sa vie. Stéphane Mallarmé eu beaucoup de mal à se plaire dans cette petite ville de province. Le premier appartement qu’il occupe, non loin de son lieu de travail confirme son sentiment d’enfermement, de tristesse et d’impuissance.
Les élèves de l’époque ne gardent pas de franc souvenir de ce professeur malheureux et raillé, qui préfére écrire ses poèmes pendant que ses élèves récitent leurs leçons.

Pourtant, les années tournonaises du poète sont les plus riches de sa carrière de poète. L’Azur, Brise marine, Sainte, Je t’apporte l’enfant d’une nuit d’Idumée !, l’Après-midi d’un faune sont nés à Tournon.
Au lycée, il se lie d’amitié avec Charles Fournel, professeur d’Allemand, l’un des rares collègues à nouer une relation avec lui.
En 1865, Stéphane Mallarmé voit la ville sous un nouvel œil : il quitte son appartement pour un autre, au pied du château d’où il a une vue imprenable sur « l’automne brumeaux de l’eau » qui lui rapelle Londres.

L’année suivante, après maintes plaintes, le proviseur obtient sa mutation, officiellement pour remplacer les professeurs de langues par un unique professeur polyglothe.

« Ce nom renferme les deux mots auxquels j’ai voué ma vie : Art et dèche. »

Correspondance avec Henri Cazalis
Août 1864

 

Les souvenirs de la venue de Stéphane Mallarmé à Tournon

Gabriel Faure fit poser en 1924 une plaque sur les lieux de sa seconde habitation : « En cette maison élevée sur les ruines de la tour du château où Pierre de Ronsard rejoignit en août 1536 le dauphin mourant ». Plus tard, une seconde plaque est posée sur les murs de son appartement à l’intersection des rues de l’île et Joseph-Parnin.
Pour célébrer le cinquantenaire de la mort du poète, en 1948, est apposé un médaillon de bronze réalisé par Marcel Gimond sur la façade du lycée (voir photo). Plus tard, la place située devant le lycée est bâptisée Stéphane-Mallarmé.
A l’occasion du centenaire de la mort du poète, deux manifestations sont organisées : Mallarmé à Tournon ou l’Azur blessé est une pièce jouée dans le cadre du festival Théâtre à Découvert, du 24 au 27 octobre. Mallarmé et après ?, conférence sur Stéphane Mallarmé se tient à Tournon et Valence, aux mêmes dates.
Pour le 150e anniversaire de l’arrivée de Stéphane Mallarmé comme professeur d’anglais au lycée impérial, l’association organise l’exposition « Mallarmé et Tournon – 1863-2013 ». Des documents inédits sont présentés au public du 15 octobre au 20 décembre 2013 au lycée de Tournon.

Stéphane Mallarmé en quelques dates

1842 (18 mars) – Naissance d’Etienne Mallarmé à Paris.
1857 – Mort de sa sœur, rédaction de ses premiers poèmes.
1862 – Séjour à Londres pour devenir professeur d’anglais. – Premières publications poétiques.
1863 (10 août) – Mariage avec Maria Gerhard. (Novembre) – 1er poste d’enseignant, au lycée impérial de Tournon.
1864 – Rencontre avec les Félibres, poètes de langue provençale. (19 novembre) – Naissance de sa fille, Geneviève Mallarmé.
1865 – 1re édition de l’Après-midi d’un faune. Editon définitive publiée en mars 1887.
1866 – Mutation pour le lycée de Besançon. Début de correspondance avec Paul Verlaine.
1867 – Nommé professeur d’anglais en Avignon.
1871 (16 juillet) – Naissance de son fils, Anatole Mallarmé. – Nommé au lycée Condorcet (Paris).
1872 – Rencontre avec Arthur Rimbaud.
1873 – Rencontres avec Edouard Manet et Emile Zola.
1878 – Rencontre avec Victor Hugo.
1879 (8 octobre) – Mort d’Anatole Mallarmé.
1884 – Professeur au lycée de Janson-de-Sailly (75). Jorys-Karl Huysmans dans A Rebours et Paul Verlaine avec son troisième article des Poètes maudits révèlent Stéphane Mallarmé au grand public.
1888 – Publication de la traduction des poèmes d’Edgar Allan Poe.
1891 – Rencontres avec Oscar Wilde et Paul Valéry.
1898 (9 septembre) – Mort de Stéphane Mallarmé à Valvins (77).

Sources et références

Faure, Gabriel – Mallarmé à Tournon – Horizons de France, 1941, Paris, réed. 1946 – 132 pages.
Lagarde, André, Michard, Laurent – xixe siècle – Les grands auteurs français du programme – Bordas, 1967, Paris – 576 pages – pp. 528 à 538.
Mallarmé, Stéphane – Poésies – Gallimard, 1998, Saint-Amand – 298 pages.
Lycée Gabriel Faure
Stéphane Mallarmé sur Wikipédia (5-10-2008)
La poésie de Stéphane Mallarmé à l’université de lettres de Nice Sophia-Antipolis
Stéphane Mallarmé sur Jean-Michel Maulpoix & Cie… (5-10-2008)
Stéphane Mallarmé sur la Grande bibliothèque poétique (5-10-2008)
Stéphane Mallarmé sur Littérature de Mallarmé et de quelques autres (5-10-2008)
Stéphane Mallarmé sur la République des Lettres (5-10-2008)

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